par Jean Gadrey pour Alternatives économiques:
Le premier graphique représente l’évolution comparée du RMI/RSA
(montant pour une personne seule) et du « revenu disponible brut des
ménages par habitant » (RDB, définition en annexes), tous les deux en
euros courants, base 100 en 1990. On peut cliquer sur les graphiques pour les agrandir.
Le résultat est clair : le RMI devenu RSA (courbe du bas) se traîne
derrière le RDB par personne,
et l’écart se creuse encore plus nettement
à partir de 2000. Le premier a progressé de 50 % en euros courants
depuis 1990, le second de 80 %.
Quant à la hausse des prix à la
consommation (voir annexe 4), elle a été de 43,5 % au cours de ces 22
ans. Le pouvoir d’achat du RMI/RSA a progressé de moins de 5 % en 22 ans
(voir graphique 3), pendant que celui du RDB par personne augmentait de
24,6 %.
Le second graphique représente l’évolution du RMI/RSA (montant pour
une personne seule) en pourcentage du RDB par habitant. On est passé de
33,4 % en 1990 à 27,9 % en 2012. On constate à nouveau que la plongée la
plus forte se produit à partir de 2000. Si les choses se stabilisent
voire s’améliorent un peu au cours des dernières années, c’est « grâce »
à la crise : le RSA n’a bénéficié d’aucun « coup de pouce » (il a
progressé à peu près comme l’inflation), mais entre 2007 et 2012 le RDB
par tête a progressé moins vite que l’inflation (6,7 % en cinq ans
contre 8,7 % pour l’inflation).
Le troisième graphique représente l’évolution, depuis 1990, 1) du
pouvoir d’achat du RMI pour une personne seule, 2) du salaire net annuel
moyen en euros constants (sources en annexe 3), et 3) du PIB par
habitant, lui aussi à prix constants. J’aurais pu remplacer la courbe du
PIB/h par celle du RDB/h en euros constants, j’aurais obtenu presque la
même chose. De 1990 à 2012, la richesse économique produite par
habitant a progressé de 23 % en volume, le pouvoir d’achat des salaires
de seulement 10,4 % (de 1990 à 2010, dernière année disponible pour
cette source), et le pouvoir d’achat du RMI, qui avait gagné 5 % au
cours des années Jospin, stagne ou régresse un peu depuis. L’envol des
revenus des riches est pour beaucoup dans le grand écart entre la courbe
du haut et celles du bas. La richesse accrue est bien allée quelque
part. On constate d’ailleurs que, même si les pauvres sont les plus mal
lotis, les salariés ne le sont guère mieux, sauf, quand même, entre 2004
et 2010.
Sources. PIB/h et salaire net annuel moyen (DADS) : INSEE. RMI :
montant au 1er janvier pour une personne seule, déflaté par l’indice des
prix à la consommation.
ANNEXES TECHNIQUES (BONUS POUR PERSONNES RÉSISTANTES)
ANNEXE 1
Le revenu disponible brut (RDB) des ménages figure dans les comptes
nationaux. On dispose de séries longues également pour le RDB par
habitant. C’est l’ensemble des revenus (d’activité, du patrimoine) du
ménage, des revenus de transfert en provenance d’autres ménages, plus
les prestations sociales y compris pensions et indemnités de chômage,
avant impôts directs (IR, taxe d’habitation, CSG et CRDS).
ANNEXE 2
Pour les deux premiers graphiques, j’aurais pu utiliser, au lieu du RDB
national par habitant, le RDB par « unités de consommation » (UC). Ces
UC sont définies ainsi par l’Insee (par convention appuyée sur certains
constats) : Pour comparer les niveaux de vie de ménages de taille ou de
composition différente, on utilise une mesure du revenu corrigé par
unité de consommation à l’aide d’une échelle d’équivalence. L’échelle
actuellement la plus utilisée (dite de l’OCDE) retient la pondération
suivante :
- 1 UC pour le premier adulte du ménage ;
- 0,5 UC pour les autres personnes de 14 ans ou plus ;
- 0,3 UC pour les enfants de moins de 14 ans.
Mais d’une part, il n’y a pas de série longue (à ma connaissance) de
RDB par UC, et d’autre part, sur cette période, l’augmentation du nombre
d’UC est à peine supérieure à celle de la population. Les tendances du
graphique 1 auraient été pratiquement les mêmes. En revanche, pour le
graphique 2, la tendance aurait été semblable, mais le niveau du rapport
entre RSA mensuel et « RDB mensuel par UC » aurait été très inférieur.
Le nombre moyen d’UC par ménage étant de l’ordre de 1,6, le RSA d’une
personne seule en 2012 ne représentait que 17,7 % du RDB par UC.
ANNEXE 3, relative à la courbe « salaires annuels » du graphique 3,
qui s’arrête en 2010 pour cause de disponibilité actuelle de ces données
complexes mais importantes que sont les DADS (déclarations annuelles de
données sociales des organisations).
L’ensemble des employeurs et de leurs salariés rentrent dans le champ
des DADS, à l’exception des agents des organismes de l’État, titulaires
ou non, des services domestiques et des activités extraterritoriales.
En revanche, sont comprises les collectivités territoriales et la
fonction publique hospitalière, introduites de manière exhaustive depuis
1992. Sont inclus également les établissements publics à caractère
industriel et commercial. En diffusion, des données issues d’autres
sources sont ajoutées aux données issues des DADS pour couvrir
l’ensemble du champ de l’emploi salarié. Le fichier ainsi constitué est
appelé « DADS grand format ».
ANNEXE 4
La hausse des prix à la consommation retenue pour « déflater » les
variations nominales du RMI/RSA dans le graphique 3 est celle de
l’indice Insee pour les ménages urbains d’ouvriers et d’employés, hors
tabac. Mais les autres indices de prix de la consommation ne
changeraient presque pas les résultats.
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