Chaque jour, le congrès du PCF vu par Patrick Apel-Muller,
directeur de la rédaction de l'Humanité. Ce samedi, le texte "Il est
grand temps de rallumer les étoiles" a été adopté par 554 voix pour, 74
contre, 21 abstentions et 6 refus de vote. Un vote qui donne tout son
sens au slogan du congrès: "La force du partage"
Qui est le Panurge de cet élan moutonnier ? L’un d’eux ayant décrété
contre tous les débats du congrès communiste que les délégués étaient
déchirés par l’absence de la faucille et du marteau sur la carte
d’adhérent, bien des médias ont emboité le pas. Dans la conférence de
rédaction d’un quotidien du matin, on a même enjoint à l’envoyé spécial
d’en faire SON sujet. Ca, c’est du journalisme, coco! Pierre Laurent a
eu beau présenter la carte du PCF de 1944 qui ne porte pas ces outils
et
sourire de cet accès de fétichisme médiatique, c’était toujours samedi
matin, la rengaine de BFM TV. Ca ne pouvait pas être celle de France 2
et de TF1. Les deux chaînes qui ont interdit d’antenne les journalistes
de l’Humanité depuis l’élection de Nicolas Sarkozy n’ont même pas
dépêché d’équipes aux assises d’un des principaux partis politiques. Au
nom du pluralisme sans doute et de l’indépendance de pensée…
Sentiment de convergence...
J’évoquais un suivisme de troupeau, rien de surprenant à ce que je
cite Buffon qui en inaugura l’étude : « L’homme n’est homme que pour ce
qu’il a su se réunir à l’homme ». Réuni : c’est l’image qu’affiche le
Parti communiste à Saint-Denis. Toutes les nuances du rouge y sont. Mais
elles ne sont pas « dispersées façon puzzle ». Dès jeudi, les délégués
avaient perçu un sentiment de convergence dans l’intervention d’André
Gérin. Même envie d’unité dans les propos d’Hervé Poly du Pas-de-Calais.
Pas de noms d’oiseaux dans les échanges, mais jusque-là une écoute
attentive des propos de l’autre.
... et liste unique
Vendredi soir la commission des candidatures a abouti pour la
première fois depuis près de vingt ans à la constitution d’une liste
unique, quand les congrès précédents voyaient des équipes concurrentes
s’affronter. Un résultat d’autant plus appréciable que la constitution
d’une « direction resserrée » a été choisie. Très massivement, les
représentants des congrès départementaux se retrouvent dans la stratégie
politique proposée, la poursuite du Front de gauche, la volonté de
rassembler toute la gauche pour qu’une politique de gauche réussisse.
« C’est n’être bon à rien de n’être bon qu’à soi », jugeait Voltaire.
L’ouverture du congrès aux vents du large, des luttes sociales aux
conflits mondiaux, des enjeux du féminisme aux impératifs écologiques,
est sans doute un indice de bonne santé. Rassérénés sur leur avenir, les
communistes se penchent à nouveau sur les problèmes les plus concrets
pour assoir leur volonté de transformer la société. Leurs débats s’en
imprègnent même quand ils s’étirent un peu dans des controverses
d’amendements sur leur Humanifeste.
« Je ne veux pas changer la règle du jeu, je veux changer le jeu »,
proclamait André Breton. La question du communisme n’est pas envisagée à
l’égal de l’horizon, cette ligne imaginaire qu’on n'atteint jamais,
mais comme réponse(s) aux impasses de civilisation qui menacent les
futurs de l’humanité: Péril écologique si la planète est stérilisée par
le court termisme du profit ; péril des conflits de la faim, de la haine
et des dominations ; gâchis monstrueux qui détruisent les capacités
humaines, assassinent les Mozart qui nous entourent ; destructions
induites par le dogmatisme de l’austérité ; régressions pour lesquelles
militent les multinationales… En affichant son congrès sous le slogan,
« la force du partage », le PCF prend le contre-pied de la concurrence
entre tous, et de chacun contre chacun.
Marche en avant
« Le plus fort n’est jamais assez fort pour être toujours le
maître », prédisait Jean-Jacques Rousseau. Et la Révolution française
secouait ensuite le vieux monde monarchique. Les communistes semblent
dépasser la seule volonté de résister à des mauvais coups pour reprendre
une marche en avant. L’attention portée par une centaine de formations
progressistes du monde aux analyses du PCF, la forte présence de
syndicalistes, de représentants d’associations, d’intellectuels lors de
la rencontre vendredi soir à l’invitation de Pierre Laurent, l’ambition
affichée sous le vers d’Apollinaire (« Il est grand temps de rallumer
les étoiles ») témoigne de cette perspective retrouvée. « Nous
partageons nos rêves et nos soleils », écrivait Eluard…
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