Article paru dans "démocratie et socialisme" (revue de la tendance "Filoche" du PS)
L’article 136 du traité de l’Union Européenne autorise
la création d’un Mécanisme européen de solidarité
(MES). Il est proposé à
la ratification du Parlement français le mardi 21 février.
La gauche dans son ensemble et les élus socialistes en
particulier devraient voter contre cette ratification pour 2 raisons
essentielles.
1. Parce que le MES est un mécanisme de solidarité à l’usage exclusif de la Finance
Les « plans d’aides » de l’Union européenne et du FMI se
présentent comme des plans d’aide à la Grèce, à l’Irlande et au
Portugal. En réalité, les Grecs, les Irlandais, les Portugais n’ont
jamais vu la couleur d’un seul euro des aides qui leur ont été
soi-disant apportées par l’Union européenne, le Fonds européen de
stabilité financière FESF) dont le MES devrait prendre la succession) et
par le FMI. Les fonds prêtés par ces institutions vont directement
rembourser les banques, les assurances et les fonds spéculatifs lorsque
les titres des dettes publiques grecques, irlandaises ou portugaises
qu’ils détiennent arrivent à échéance.
Par contre, c’est bien aux peuples grecs, irlandais ou
Portugais de rembourser les sommes versées directement à la Finance par
le Fonds européen de Stabilité financière (FESF). Il en irait de même,
demain, pour les sommes directement versées à la Finance par le MES si
des pays européens (l’Italie, l’Espagne…) choisissaient de faire appel à
l’Union européenne et au FMI.
Par contre, ces sommes versées directement à la Finance
seront assorties de conditions, c’est-à-dire de plan de destruction
sociale tels que ceux qui ont été imposés à la Grèce, au Portugal ou à
l’Irlande. Cette institutionnalisation des pratiques du FMI et de
l’Union européenne serait inscrite dans le traité puisque le texte
soumis à la ratification du Parlement stipule expressément : « l’octroi
au titre du mécanisme de toute assistance financière nécessaire sera
subordonné à une stricte conditionnalité ».
Constater les effets économiques, financiers et sociaux
de ces « conditionnalités » en Grèce ne peut qu’entrainer le refus de
ratifier le MES.
La Grèce subira en 2012 sa cinquième année de récession
consécutive. Les plans de destruction sociale qui lui ont été imposés ne
lui ont pas permis de sortir de la récession liée à la crise bancaire
de 2007-2008. En 2011, son PIB a encore diminué de 6 %. L’année 2012
sera encore pire.
En 2010, la dette publique grecque s’élevait à 140
milliards d’euros. Moins de deux ans plus tard, les conditions imposées à
la Grèce ont amené cette dette à 162 milliards d’euro.
Le chômage dépasse les 22 % de la population active et
atteint 45 % chez les jeunes (49,5 % chez les jeunes femmes). Les
salaires et les retraites ont été amputés de 50 % et même, dans certains
cas, de 70 %. La malnutrition fait des ravages parmi les enfants de
l’école primaire. La faim fait sa réapparition surtout dans les grandes
villes du pays dont le centre est occupé par des dizaines de milliers de
SDF, misérables, affamés et en haillon. Les hôpitaux ne peuvent plus
fournir les médicaments de base. 35 % des grecs font maintenant appel
aux hôpitaux de rue pour pouvoir se soigner (5 % avant la crise)… Le
nouveau plan de restructuration sociale que vient de voter le Parlement
grec supprimera les conventions collectives, imposera la suppression
immédiate de 15 000 emplois dans le secteur privé et abaissera de 22 %
le salaire minimum, de 32 % pour les jeunes qui ne percevront plus que
527 euros par mois quand ils auront la chance d’avoir un travail à temps
plein. Les retraites complémentaires diminueront de 15 %. Par contre
les cotisations sociales patronales diminueront de 2 % en 2012 et de
13 % en 2013 !
2. Parce que le MES est indissociable du traité européen que veulent nous infliger Sarkozy et Merkel : le « Traité sur la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire » (TSCG)
L’octroi d’une « assistance financière » par le MES sera
conditionné à partir du 1er mars 2013 à la ratification du TSCG qui
inclut, notamment, la « règle d’or » de Merkozy.
Qui accepte l’un, accepte l’autre.
Pour appuyer la volonté de François Hollande de
renégocier le traité de Merkozy, il est nécessaire de ne pas lui
entraver les mains en votant pour une ratification du MES et par là-même
du TSCG.
En votant contre cette ratification, les élus
socialistes aideraient François Hollande à créer un rapport de forces
qui lui faciliterait la tâche lorsqu’il ira, comme il l’a annoncé,
rencontrer Angela Merkel pour renégocier le TSCG.
Jean-Jacques Chavigné
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